BioTEPP: chasseur de vers

Le Soleil —

 
Pour plusieurs Québécois, BioTEPP est une inconnue ou presque. Au pays de Donald Trump, la situation est inversée. La compagnie lévisienne se retrouve sur les lèvres de producteurs de pommes, de poires et de noix de Grenoble, en raison du réchauffement climatique.
 
« Nous roulons à 100 % de notre capacité de production », indique le patron Claude Gagnon, qui cherche actuellement à prendre de l’expansion pour tripler sa production de biopesticide d’ici 2020.

Deux projets sont à l’étude. Un réaménagement des installations et des opérations de son usine à Cap-Chat, en Gaspésie, ou l’ouverture de nouvelles installations dans la grande région de Québec.

Si c’est la deuxième option qui est retenue, BioTEPP promet qu’elle conservera tout de même son usine de production de Cap-Chat. La réponse devrait tomber d’ici quelques semaines.

Pour l’heure, la compagnie réalise 90 % de son chiffre d’affaires, qui oscille aux alentours de 1,5 million $, du côté des États-Unis, notamment dans les états de Washington et de l’Oregon, où sont cultivées plus de 50 % des pommes américaines. L’autre 10 % des ventes est effectué à travers le Canada.

Il faut dire qu’annuellement, les Américains produisent en moyenne 13 fois plus de pommes que le Canada. Et que la production de pommes de l’état de Washington est près de 30 fois celle du Québec.

Virosoft CP4

Fondée en 1998, BioTEPP, dont le siège social est basé dans l’incubateur AgBio Centre à Lévis, a développé au cours des dernières années un biopesticide appelé Virosoft CP4. Ce dernier s’attaque au ver de pomme, le cauchemar des producteurs.

« Notre produit est un insecticide naturel reconnu mondialement et qui rivalise d’efficacité avec les pesticides chimiques », explique M. Gagnon, ajoutant qu’au fil des ans, le carpocapse a trouvé des façons pour résister aux insecticides chimiques et que plusieurs de ces produits ont été bannis des tablettes des commerces.

« Nous développons aussi un autre virus que nous avions dans notre congélateur depuis des années qui s’attaque aux insectes qui mangent le chou, le chou-fleur et le brocoli. C’est très prometteur », poursuit l’agronome de formation.

Pour les prochaines années, BioTEPP souhaite davantage étendre son territoire de chasse vers l’Argentine et à travers les États-Unis, notamment en Californie où la compagnie est en processus pour faire homologuer son produit phare. Il n’est toutefois pas question d’ouvrir de nouveaux bureaux.

« Malgré le manque de fonds, l’entreprise a toujours été portée par l’efficacité de son produit », avance M. Gagnon, actionnaire chez BioTEPP depuis 2000. Il occupe la chaise de président depuis 2015, année où la direction a réalisé un remue-ménage à l’interne.

 

« Malgré le manque de fonds, l’entreprise a toujours été portée par l’efficacité de son produit. »
Claude Gagnon, copropriétaire de BioTEPP

Aujourd’hui, BioTEPP est une famille d’une quinzaine de travailleurs. Environ le double de paires de bras sera nécessaire au cours des prochaines années pour répondre à l’augmentation de la production qui devrait mener à un chiffre d’affaires de 4,5 millions $ d’ici deux ans, parole du patron.

Mais quel est le lien entre l’augmentation des ventes de BioTEPP et le réchauffement climatique, vous demandez? En fait, la direction répond que les vers de pomme sont stimulés par le réchauffement de la planète.

Coup de pouce

Afin de soutenir les nombreux projets de l’entreprise, le fonds de développement québécois Filaction et l’organisation Produits naturels Canada ont récemment annoncé injecté des billets verts dans BioTEPP. Le montant n’a toutefois pas été dévoilé.

En juillet, le gouvernement du Canada a également délié les cordons de sa bourse pour octroyer une aide financière de 400 000 $. L’argent devrait, entre autres, servir pour l’homologation du produit pour de nouveaux marchés et pour le développement d’une régie d’élevage de larves de carpocapse.

Mais puisqu’on est en période électorale et que le huard est souvent le nerf de la guerre pour les PME, M. Gagnon tenait à passer un message au futur gouvernement.

« Quand on regarde les entreprises à succès du Québec d’aujourd’hui, il y a de très très fortes chances que ce soient des entreprises qui ont bénéficié du financement par actions du programme REA [Régime d’épargne-actions du Québec]. Ce coup de génie de Jacques Parizeau qui donnait aux entrepreneurs visionnaires, possédant un concept et [ou] une technologie solide, l’opportunité de prospérer. Un nouveau programme REA donnerait à BioTEPP la capacité de réaliser ses ambitions », conclut celui qui a cofondé par le passé Axter Agroscience.

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